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Les multiples bienfaits du vélo

Le vélo est le mode de transport le plus écologique après la marche. Si se déplacer à vélo n’est pas aujourd’hui un réflexe, il faut toutefois lever un certain nombre d’approximations ou d’idées reçues sur ce mode de déplacement. Dans une société basée sur la culture de la voiture, promouvoir l’usage de la bicyclette est parfois très difficile. Pourtant les bienfaits du vélo sont multiples.

La pratique du vélo en France

Selon l’Insee, en 2017, 74% des déplacements domicile – travail s’effectuait en voiture et seulement 2 % en vélo. Pourtant plus de 30 % de la population active vit à moins de 5 kilomètres de son travail mais 60 % s’y rendent en voiture. On peut noter que cette distance peut être facilement parcourue à vélo.

Depuis l’essor du vélotaf (pratique consistant à se rendre au travail à vélo) il y a une quinzaine d’années et plus récemment l’épidémie de COVID-19, la part modale du vélo est passé à 6 %. Selon l’association Vélo & Territoires, le croissance de l’utilisation de la bicyclette ne faiblit pas : +9 % depuis le début de l’année 2022 par rapport à 2021 et +34 % par rapport à 20191.

La pratique du vélo pour se rendre à son travail reste majoritairement une pratique urbaine. Les cadres y ont plus recours que les employé·es. Enfin, les villes les plus cyclistes sont Grenoble et Strasbourg où 17 % des trajets se font en vélo. Nice, Marseille ou Saint-Étienne arrive en queue de peloton avec seulement 2 % de la population en emploi et ne travaillant pas à domicile2 se déplacent en bicyclette.

Une volonté d’avoir des déplacements plus écologiques

Selon une enquête réalisée en novembre 2021 par La Fabrique de la Cité pour IPSOS, 48 % des Français·es estiment que leur mode de déplacement n’est pas écologique. 91 % aimeraient pouvoir réduire leur impact. Si un·e Français·e sur deux a la volonté d’y arriver en moins de 5 ans, 73 % estiment cependant que cela reste compliqué voire impossible. Ces personnes interrogées pointent par exemple le manque de transports en commun, un éloignement des stations de covoiturage, des gares, des stations de métro ou de tramways…

Efficacité énergétique de différents véhicules en Wh/km (Source : Twitter Aurélien Bigo)

Un coût non négligeable

Selon la même enquête IPSOS, 47 % des habitant·es de banlieue ou de zone périurbaine considèrent que leurs déplacements au quotidien ne sont pas bon marché.

Selon la Fondation pour la Nature et l’Homme, 13,3 millions de Français·es sont en précarité mobilité. Elle recouvre deux formes. D’une part, les personnes ont des budgets carburants élevées, des voitures vieillissantes, des distances à parcourir qui augmentent et souvent pas d’alternatives individuels. D’un autre côté, il y a celleux qui ne possèdent pas de véhicules ou ne peuvent accéder aux transports collectifs. Iels représentent 8,5 % de la population. Cela se traduit par des renoncements : accès au travail, aux soins ou aux loisirs.

Le transport, une source important de gaz à effet de serre

Le transport dans le monde représente 25 % des gaz à effet de serre et plus de la moitié sont dues à la voiture. La demande en transport routier devrait être multipliée par trois en 20503. Pourtant le recours massif aux véhicules électriques ne permettra pas d’atteindre les objectifs climat et de rester sous la barre des 2°C de réchauffement global. Par exemple, aux États-Unis, il faudrait recourir à 350 millions de voitures électriques qui utiliseraient la moitié de la consommation électrique du pays et une quantité excessive de matériaux critiques. La conclusion est la même pour les véhicules à hydrogène ou ceux utilisant des biocarburants4. Il est donc nécessaire de diminuer la possession et l’usage de la voiture individuelle.

Impact carbone en gCO2e/km pour différents véhicule tout au long de leur cycle de vie (Source : Twitter Aurélien Bigo)

L’usage du vélo dans le monde

Pour les courtes distances, l’utilisation du vélo est tout à fait adapté. Pourtant la bicyclette joue un rôle marginal dans les déplacements dans la plupart des pays à l’exception du Danemark et des Pays-Bas. Dans une récente étude parue dans Communications Earth & Environment4, les scientifiques ont cherché à caractériser la possession et l’utilisation des vélos par pays entre 1962 et 2015.

La pratique du vélo est disparate suivant les pays. La bicyclette représente dans la plupart des cas moins de 5 % des déplacements. En Australie ou aux États-Unis, c’est une activité de loisirs. Quand les transports publics sont très performants comme au Japon, en Suisse ou en République Tchèque, ces derniers sont préférés à la voiture et au vélo. En conséquence, posséder un vélo ne prouve pas qu’on l’utilise au quotidien.

Les Danois·es et les Hollandais·es possèdent le plus haut taux d’équipement du monde et se déplacent beaucoup à vélo : plus de 20 % du total des déplacements. Une forte culture vélo, une sensibilisation environnementale, des infrastructures bien développées et des terrains plats expliquent ce résultat.

Les bénéfices pour le climat

Ces mêmes chercheur·es ont montré que si nous utilisions le vélo comme au Danemark, soit 1,6 kms/jour (<50 kms/mois), nous économiserions l’équivalent des émissions de la Grande-Bretagne. Dans l’hypothèse d’un mode de déplacement à la hollandaise, 2,6 kms/jour (<80 kms/mois), on éviterait l’équivalent de 86 % des émissions carbone de l’Allemagne ou environ 20 % des émissions des automobiles en circulation dans le monde.

En Grande-Bretagne, un cinquième des émissions de CO2e sont dues à des déplacements inférieures à 8 kilomètres5. L’étude portant sur 50 personnes montrent qu’un trajet sur deux est inférieur à 5 kilomètres. Pourtant 20 % pourraient facilement être réalisé à pied ou à vélo. Mais les habitudes, les contraintes de temps, le transport d’enfants ou de lourdes charges, le manque d’infrastructures expliquent le peu de report modal sur le vélo. En conclusion de l’article, dans 41 % des cas, les déplacements en voiture sur des courtes distance pourraient se faire à pied ou à vélo. Ces nouvelles habitudes permettraient d’économiser 5 % des émissions de gaz à effet de serre pour ce type de déplacements.

Comparaison des émissions de CO2 lors de la production et de l’utilisation pour différents véhicules. (Source : Atlas des Mobilités, 2022)

Les autres bienfaits de la marche et du vélo

Outre la baisse des émissions des gaz à effet de serre, la diminution de l’usage de la voiture a de nombreux bénéfices. On peut citer par exemple la baisse de la pollution due au trafic automobile (particules fines). Les bienfaits pour la santé sont aussi nombreux : diminution de la sédentarité et des maladies chroniques. La pratique du vélo augmente aussi l’activité physique modérée et régulière.

Enfin, la hausse du trafic vélo augmente mécaniquement le nombre de décès par accident (si on n’améliore pas la sécurité routière dans le même temps) mais le nombre de morts évités est bien supérieure, entre 430 000 et 780 000.

Les bienfaits des mobilités actives dont le vélo (source : Atlas des mobilités, 2022)

Comment améliorer l’utilisation du vélo au quotidien ?

Le Danemark et la Hollande ont mené depuis des années une vraie politique vélo. Ces deux pays ont développé une importante infrastructure de pistes cyclables, bien aménagées, sans discontinuité ainsi que la mise en place d’une culture pro-vélo dès l’enfance. Enfin, ils ont instauré des taxes pour dissuader de prendre la voiture.

Le développement des vélos à assistance électrique (VAE) est aussi une autre solution. Il est particulièrement adapté pour les distances supérieures à 5-10 kilomètres, pour les reliefs accidentés ou le transport d’enfants (vélo cargo ou vélo long tail par exemple). Le VAE est apprécié par les femmes, les personnes âgées et les jeunes qui les utilisent le plus. Si les VAE et les autres véhicules intermédiaires sont chers, des aides conséquentes à l’achat neuf ou d’occasion ou la transformation de vélo classique en VAE seraient plus que nécessaire.

Les VAE ont de nombreux avantages6. Ils polluent beaucoup moins qu’une voiture électrique et permettraient de réduire de 225 à 460 kg les émissions de CO2 par personne et par an. Ce véhicule léger consomme 40 fois moins d’énergie par passager et émet 55 fois moins de CO2 qu’un véhicule. Cette étude montre aussi qu’il n’y a aucune différence en terme d’accidents ou d’infractions entre un VAE et un vélo classique. Tout comme la bicyclette, les VAE ont de nombreux bienfaits : écologiques, santé, coût (par rapport à une voiture), âge.

Les différents types de véhicules intermédiaires (Source : Twitter Aurélien Bigo)

Les cyclistes, des dangers sur la route, vraiment ?

Une idée reçue très répandue est que les cyclistes commettent plus d’infractions que les automobilistes. Une étude danoise de 20197 relayée notamment dans la presse française et québécoise révèle que c’est l’inverse. En installant des caméras sur les carrefours de grandes villes danoises, l’Autorité Danoise des Transports a observé les comportements des cyclistes. Elle a relevé que 14 % d’entre eux commettaient des infractions (comme monter sur le trottoir) contre 66 % des automobilistes (comme ne pas respecter les limitations de vitesse). En présence d’infrastructures cyclables, seul 5 % des cyclistes commettent des infractions. Comme le relève le journal Libération, une étude similaire à Londres montre que 16% des cyclistes franchissent un feu rouge.

Les infractions commises par les cyclistes sont plus visibles que celles commises par les automobilistes. Qui notera un excès de vitesse en ville, un refus de priorité au passage piéton, un oubli de clignotant ou dépasser un·e cycliste à moins d’un mètre ? Ces infractions sont beaucoup moins visibles que griller un feu ou monter sur un trottoir en vélo. Croire que les cyclistes commettent plus d’infractions est une perception plus que la réalité.

Les atouts du vélo au quotidien

Selon le rapport sur la mobilité8 du Réseau Action Climat, l’usage du vélo au quotidien permet de réduire de 92 % le coût de la mobilité par rapport à l’usage de la voiture. Il permet de diminuer la pollution et aussi les émissions de gaz à effet de serre. Côté santé, on note la diminution des maladies chroniques et la pratique d’activité physique régulière. Le vélo permet également de diminuer la mortalité.

Pourtant, le vélo au quotidien n’est pratiqué que par 5 % de la population d’un pays en moyenne. Afin d’augmenter la part modale de ce mode de transport, il faut créer des pistes cyclables bien conçues et denses, comme au Danemark ou aux Pays-Bas mais aussi une culture pro-vélo.

Faites-vous du vélo au quotidien ?

Bibliographie :

1 Fréquentations vélo en France 2022 – Bulletin n°5 du 09/11/2022, Vélo & Territoires

2 La voiture reste majoritaire pour les déplacements domicile-travail, même pour de courtes distances, Insee Première, n°1835, Janvier 2021.

3 Chen W. et al, Historical patterns and sustainability implication of worldwide bicycle ownership and use, Communications Earth & Environment, 2022

4 Milovanoff A et al., Electrification of light-duty vehicle fleet alone will not meet mitigation targets, Nature Climate Change, 2020

5 Neves A. et Brand C., Assessing the potential for carbon emissions savings from replacing short car trips with walking and cycling using a mixed GPS-travel diary approach, Transportation Research, 2019

6 Jenkins M et al., What do we know about pedal assist E-bikes? A scoping review to inform future directions, Transport Policy, 2022

7 L’étude n’est malheureusement pas disponible en ligne

8 Comment transformer la mobilité du quotidien ?19 mesures pour une mobilité plus juste et plus durable, Réseau Action Climat France, 2022

Crédit photo : Sebastian Arie Voortman (Pexels) pour la photo de couverture

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